🧐 Le salarié qui fait état auprès de son supérieur hiérarchique d’une “gestion douteuse”, d’une “organisation délétère” et de “conduites abusives” au sein du service tient-il des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs ?

une femme tient deux masques dans ses mains

Non !

Dans une affaire ayant donné lieu à un récent arrêt de la Cour de cassation (Soc. 8 novembre 2023, 21-25.990), un salarié avait fait l'objet de deux avertissements puis, quelques mois plus tard, d'une mise à pied conservatoire et d'un licenciement.

Le salarié avait contesté devant les prud'hommes son licenciement, en demandant l'annulation de celui-ci pour harcèlement moral, ainsi que des dommages-intérêts au titre du harcèlement.

Le premier avertissement avait été délivré en raison d'un courriel envoyé par le salarié à son supérieur hiérarchique, dans lequel il faisait état d’une “gestion douteuse”, d’une “organisation délétère” et de “conduites abusives” au sein du service.

L'employeur reprochait au salarié la teneur du courriel et le ton employé dans celui-ci, qui étaient "exagérés, dénigrants, déplacés et menaçants vis-à-vis de [son] encadrement".

La cour d'appel a refusé d'annuler l'avertissement, au motif que les propos reprochés apparaissaient "à tout le moins excessifs" et que le salarié, pressé par l'employeur de se justifier, avait refusé de répondre aux convocations de son supérieur, de sorte qu'aucune atteinte à sa liberté d'expression ne pouvait être invoquée.

La Cour de cassation censure l'arrêt.

Elle rappelle que "sauf abus résultant de propos injurieux, diffamatoires ou excessifs, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées".

Puis elle relève, en l'espèce, que "le courriel litigieux, adressé uniquement à un supérieur hiérarchique pour dénoncer ses conditions de travail et rédigé en des termes qui n'étaient ni injurieux, ni diffamatoires ou excessifs, ne caractérisait pas un abus dans la liberté d'expression du salarié".

Un point intéressant sur la portée de la cassation : la censure des dispositions de l'arrêt rejetant la demande d'annulation de l'avertissement entraîne, par voie de conséquence, la cassation des chefs de dispositif ayant débouté le salarié de sa demande au titre du harcèlement moral (car la cour d'appel s'était notamment fondée sur l'absence d'annulation de l'avertissement pour exclure tout harcèlement), et de celle au titre de la nullité de son licenciement fondée sur les faits de harcèlement moral qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

Le travailleur est assis avec les pieds sur la table.

La chambre sociale avait déjà censuré un arrêt de cour d'appel ayant relevé un manque de respect d'une salariée à l'égard de sa hiérarchie, au motif que la cour d'appel n'avait pas caractérisé "en quoi les propos tenus par la salariée comportaient des termes injurieux, diffamatoires ou excessifs" (Soc. 11 octobre 2023, 22-15.138).

On rappellera que le licenciement prononcé, même en partie, par l'employeur pour un motif lié à l'exercice non abusif par le salarié de sa liberté d'expression est nul (Soc. 4 octobre 2023, 22-17.734), notamment lorsque le salarié est licencié :

  • pour avoir relaté des faits qui seraient de nature à caractériser une violation du code de déontologie de la profession (Soc. 19 janvier 2022, 20-10.057),
  • pour avoir dénoncé la gestion désastreuse d'une filiale tant sur le terrain économique et financier qu'en termes d'infractions graves et renouvelées à la législation sur le droit du travail (Soc. 29 juin 2022, 20-16.060),
  • pour avoir refusé d'accepter la politique de l'entreprise basée sur le partage de la valeur "fun and pro" (Soc. 9 novembre 2022, 21-15.208).

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